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Souvenirs de Maître Xu Yun: Chapître 12 - Mo Shanpar Jy Din Shakya, recueillis par Ming Zhen (Chuan Yuan) ShakyaTraduit de l'anglais par Rev. Shi Chuan Guang, OHY Nombreuses furent les femmes qui excellèrent dans la pratique du Chan. Beaucoup atteignirent la maîtrise, et certaines même surpassèrent le magistère d'hommes éminents. Prenez le cas de Maître Mo Shan. Selon l'habitude en usage dans la plupart des monastères, le nom de Mo Shan était celui de la montagne où était situé le sien. Elle fut renommée pour la profondeur de sa compréhension du Chan et pour son talent à guider ses étudiants vers l'Eveil. Le moine Quan Xi, qui devait devenir le Maître de Chan Chuan Xi, avait entendu vanter le succès de ses méthodes. Après avoir passé quelques années auprès de l'illustre Maître Jin Ji -années au cours desquelles il avait beaucoup appris, sans pourtant parvenir à l'Eveil- Quan Xi décida de faire visite à Mo Shan afin de savoir si elle pouvait quelque chose pour lui. Je suppose que Xuan Xi avait succombé à la maladie qui trouble maints disciples des grands maîtres. Ceux là s'imaginent qu'il vaut mieux demeurer le disciple non éveillé d'un maître fameux que le disciple éveillé d'un maître inconnu. Certains pensent de même à propos du sexe. Ils supposent qu'un étudiant mâle non éveillé vaut mieux qu'un Maître du genre féminin. On pourrait appeler cela du machisme Chan. Quoi qu'il en soit, le moine Quan Xi, un peu matamore, se rendit au monastère de Mo Shan. Il jouait les chevaliers condescendants, absolument convaincu de sa supériorité de pratiquant mâle du Chan. Il ne relevait pas la tête et ne battait pas bruyamment des ailes à la manière d'un faux bourdon devant la ruche; mais il n'était pas très éloigné d'une telle conduite. Quan Xi pénétra dans la salle juste au moment où Mo Shan prenait place sur le haut siège du magistère. Il aurait dû se prosterner devant elle en attitude de révérence et la prier humblement de l'accepter comme étudiant. Mais Quan Xi ne pouvait s'humilier ainsi devant une femme. Mo Shan l'observa un moment puis d'adressant à un assistant, elle demanda: "Ce garçon est il un candidat étudiant ou est-ce un spectateur du paysage?" Quan Xi éleva la voix: "Je ne suis pas un touriste. Je suis un adepte du Dharma de Bouddha." Mo Shan feignit la surprise: "Adepte du Dharma.? Et dites moi comment vous êtes arrivé ici." "Je suis arrivé par la grand'route." "Et pensiez vous que vous aviez laissé le Dharma sur la route derrière vous, et que vous ne sauriez le trouveriez ici?" Quan Xi ne sut que dire. Il esquissa une vague génuflexion en guise de marque d'obéissance; plus pour cacher sa confusion que pour marquer son respect. Mo Shan ne se satisfit point de ce simulacre arrogant. "Il n'est pas de frontières du Dharmakaya que vous soyez en mesure d'outrepasser par votre suffisance, dit elle. Le Dharmakaya est partout, de même que les règles, la loi et le Dharma du Bouddha. Il vous faudra adapter votre conduite sur les modèles acceptés. C'est la condition à laquelle vous devrez vous soumettre. Quan Xi se prosterna à contrecoeur. Quand il se releva, il ne put s'empêcher de demander: "Et quelle est la condition qui règne dans le crane de Mo Shan?" Il prenait le risque de se mesurer à elle. Ce disant, il exigeait qu'elle lui dît si elle était éveillée ou non. Mo Shan sourit à cette impertinence: "Qui parmi les disciples du Bouddha est capable de voir la marque sacrée sur son propre front? " Elle voulait dire que un est un et que si Quan Xi ne voyait par lui même qu'elle était éveillée, c'est justement parce que lui même ne l'était point. "Où puis je trouver l'homme qui dirige Mo Shan?" demanda-t-il alors avec morgue, jouant à la fois sur le nom de la femme et sur le nom du monastère. "Ce qui est en charge de Mo Shan n'est ni homme ni femme" répondit elle. "Cette personne en charge devrait pourtant être assez puissante pour pouvoir acquérir un sexe, rétorqua-t-il. Il mettait toute sa force intellectuelle à exaspérer son machisme. Mo Shan fixa intensément Quan Xi et di doucement:" Ce qui est en charge de Mo Shan n'est ni un spectre, ni un démon ni une personne. En quoi l'Un pourrait il se transformer?" Quan Xi tout soudain saisit le message. Pendant un instant il se tint comme frappé par son audacieuse ignorance. Puis il tomba à genoux et fit une profonde et sincère prosternation. Il avait enfin compris. Il demeura trois ans au monastère de Mo Shan, où il s'occupait de jardinage. Sous la direction de Mo Shan, il atteignit l'Eveil. Plusieurs années plus tard, devenu à son tour un maître suivi par des disciples, il eut coutume de dire: "L'éveil exige une pleine mesure du Grand Pot. De mon père spirituel Lin Ji j'en ai reçu une demi louche. C'est ma mère spirituelle Mo Shan qui m'a donné l'autre moitié. Et depuis que j'ai reçu d'elle cette ration, je n'ai plus jamais eu soif."
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dernière revision:
11/07/2004
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